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Programme de M.Mélenchon
Programme de M.Hamon
Programme de M.Fillon
Programme de M.Macron
Préambule
Le délitement du bloc néolibéral, hégémonique jusque là, est désormais patent: selon l’analyse gramscienne, nous voilà engagés dans une période de crise. Aucun des deux candidats issus des primaires des deux grands partis ayant exercé le pouvoir dans les trente dernières années ne figure, à une semaine du scrutin présidentiel, dans le trio de tête des intentions de vote déclarées. Au contraire, M. Macron, M. Mélenchon et Mme Le Pen revendiquent leur hostilité à ces partis et s’inspirent stratégiquement des théories politiques de Laclau et Mouffe sur le passage par un “moment populiste” lors de l’éclatement d’une crise de régime. Partant de la défiance généralisée vis-à-vis des corps intermédiaires (partis, syndicats), du “système”, de ”l’establishment” et de l’”oligarchie”, cette théorie suppose que la création d’un nouveau bloc hégémonique passe par un dialogue direct, sans intermédiaire entre un homme et un “peuple”, celui-ci étant le vecteur d’unification d’une multitude d’intérêts disparates. Le “peuple” désigne la frontière politique d’un nouveau “nous” qui s’oppose à un “eux”, et qui ne recoupe ni les classes sociales ni le contour du bloc hégémonique en cours de dislocation. Le national-populisme de Mme Le Pen s’est nourri du déclassement, de l’atomisation sociale et des espoirs déçus des classes moyennes péri-urbaines et extra-métropolitaines. Le “peuple” que prétend incarner Mme Le Pen est essentialisé, fait d’identité nationale et de désir mortifère d’autorité. M. Macron effectue une tentative originale de populisme néolibéral dicté par les élites financières. Il incarne, comme Mme Le Pen, une tentation autocratique que démontre la structure extrêmement centralisée du parti césariste En Marche (E.M.), construit autour de sa personne, et la volonté affichée de gouverner par dessus la représentation nationale [1]. Le populisme de réenchantement par le nouveau capitalisme fait de M. Macron le candidat de la perpétuation du régime, avec le risque de perpétuer dans le même temps les causes de la montée en puissance du Front National. M. Mélenchon, enfin, construit sa campagne autour du progrès social, et tente de construire un “peuple” qui déborde le cadre de la gauche pour renouveler l’alliance transclasses qui porta Mitterrand au pouvoir en 1981. Il parie, en somme, sur un nouvel ancrage populaire des progressistes pour battre le national-populisme qui menace.
Pour notre part, nous ne croyons pas à l’Homme providentiel et n’y avons jamais cru. Nous persistons à croire que l’indécision de l’électorat se résoudra par l’examen attentif des propositions de politiques publiques. Nous avons donc mis à jour la présentation critique des programmes pour l’enseignement supérieur et la recherche des quatre candidats en “on”, délaissant celui de la candidate en “haine” [2]. Nous avons opté pour l’ordre inverse de la présentation initiale, de la rupture avec les trois décennies de néolibéralisme proposée par M. Mélenchon à la poursuite du programme de dérégulation de M. Macron, qui vise à la construction d’un marché de l’enseignement supérieur et de la recherche.
M.Mélenchon
1 Sources
Livret ESR:
https://avenirencommun.fr/livret-de-lenseignement-de-recherche/
Réponses à l'AJSPI:
https://www.ajspi.com/fr/presidentielle-2017/jean-luc-melenchon
Réponses à la CPU:
http://www.cpu.fr/wp-content/uploads/2017/03/JLM2017_reponse-CPU-15032017.pdf
Réponses au questionnaire "Science et technologie" de 100 universitaires:
http://science-et-technologie.ens.fr/-IV-Enseignement-superieur-et-Education-scientifique-#iv1
2 Conseillers
Il n’y a pas à proprement parler de conseillers dans l’équipe de campagne de M. Mélenchon. Son programme se constitue pour l’essentiel par des apports extérieurs, par des réunions publiques et par un système d’auditions systématique sans équivalent. L’absence de lobbying de la sphère gestionnaire de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche va sans dire.
3 Le passé
M. Mélenchon a été ministre délégué à l'Enseignement professionnel de 2000 à 2002, auprès du ministre de l'Éducation nationale M. Lang, dans le gouvernement de cohabitation de Lionel Jospin. La recherche avait alors été séparée de l’enseignement supérieur au sein d’un ministère confié à M. Schwartzenberg. M. Mélenchon a porté la réforme du baccalauréat professionnel de 2001, réforme généralisée en 2009.
4 Le programme
Il s’agit d’un livret public court et d’un livret plus long et plus détaillé à l’usage du candidat et des contributeurs. Il s'appuie sur une analyse critique de la situation et de son évolution récente – le démantèlement programmé du service public d’enseignement supérieur et de recherche, le pilotage et l’”autonomie”, le désengagement de l’État, la précarisation et la bureaucratie, la perspective imminente d’une séparation entre universités de recherche et collèges universitaires paupérisés – pour développer un projet, puis des propositions de réformes. Le programme promeut une idée de l’Université qui crée et critique les savoirs au service du bien commun, fondée sur l’indépendance des universitaires, donc sur des libertés académiques renouvelées, sur le dialogue entre science et société, sur la coopération et le caractère collectif de la recherche et de l’enseignement. L’Université transmet un savoir adossé solidairement à la recherche. Elle doit être fondée sur la gratuité et la possibilité de reprise des études. Elle doit, enfin, être libérée des féodalités.
M. Mélenchon souhaite une sortie de l’austérité, qui permettra de porter l’effort de recherche et développement à 3% du produit intérieur brut (PIB) en 2022, dont la moitié consacrée au système public. Il propose d’abolir le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) et d'ajouter 23 milliards € en 5 ans au budget de l’enseignement supérieur et la recherche (ESR), avec une montée en charge progressive programmée pour atteindre 1,5% du Produit Intérieur Brut en fin de mandat. Ce budget sera consacré à la gratuité de l’Université (comme en Allemagne) dès la rentrée 2018, à un programme immobilier (amphithéâtres, labos, salles de travail et de vie sociale et citoyenne), à un plan de recrutement de 5 000 personnels en 3 ans et à un plan parallèle de titularisation de tous les précaires exerçant des fonctions pérennes. En outre, les dotations de recherche seront versées sous forme de crédits récurrents. Hors de ce poste budgétaire, on trouve également une allocation autonomie de 800 € par mois pendant trois ans pour les jeunes adultes en formation, à un programme immobilier (15 000 mises en chantier de logements sociaux étudiants par an),
M. Mélenchon souhaite mettre fin à la mise en concurrence entre individus et entre structures. Il propose de supprimer l’Agence Nationale de la Recherche (ANR), les Investissements d’Avenir (PIA), le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) et les primes au mérite. Il propose de coiffer tous les établissements par un unique "cadre national de l'Université" reposant sur la collaboration du CNU et du CNESER et organisant les campus en réseau souple et fixant le cadrage national des diplômes de Licence et de Master reconnus. La licence fondée sur la validation progressive des enseignements aurait une durée flexible, de 2,5 à 4,5 ans.
L’Université serait sous la tutelle d’un ministère de plein exercice. Les universitaires seraient recrutés par un concours national par le Conseil National des Universités (CNU), sur le principe du CNRS. Le service des enseignants-chercheurs serait abaissé à 160 heures (équivalent TD – actuellement l’obligation de service annuel se monte à 192 heures équivalent TD). M. Mélenchon, comme M. Hamon, propose la création d’une section Economie et société au CNU. Il promeut la diffusion des connaissances au-delà de l’Université et souhaite créer un pôle éditorial public fondé sur l’“open access”.
M. Mélenchon propose un moratoire sur les regroupements universitaires, la dissolution des ComUE, et l’organisation de référendums des personnels sur les fusions. Il propose un retour à la démocratie universitaire, basée sur des conseils d’unité élus et sur un changement des règles électorales universitaires. Les présidents seraient désignés par les seuls membres élus du Conseil d’Administration, pour un mandat unique et seraient révocables par le CA. Les administrateurs ne seraient plus autorisés à s’accorder des primes. Les collèges électoraux des différentes catégories de personnels seraient fusionnés.
Ces trois trains de mesures supposent une loi votée rapidement et remplaçant les lois Pécresse, Fioraso et Sauvadet.
M. Mélenchon souhaite réformer la formation des enseignants du secondaire en plaçant le concours de recrutement, ouvrant le droit à un statut d’élève-fonctionnaire stagiaire, en fin de Licence voire dès le baccalauréat pour un nombre plus limité de candidats. Les masters d’enseignement auraient pour objectif de solidifier les bases disciplinaires et de faire acquérir les méthodes d’enseignement au cours de stages. L’alimentation du concours serait garantie par un système de pré-recrutement.
5 En résumé
Le programme de M.Mélenchon a été construit de manière horizontale et ouverte, ce qui tranche avec la verticalité de sa campagne. Le programme est très clair dans sa vision et dans les politiques publiques qu’il propose. Ce programme combine des moyens, liés à une sortie des politiques d’austérité, un changement profond de la structure de l’ESR qui rompt avec l’ère néolibérale et s’apparente à une renationalisation, un changement profond du mode de financement de la recherche, un engagement vis-à-vis des buts de l’Université et des libertés académiques.
M.Hamon
1 Sources
Programme ESR de Benoît Hamon (27 mars 2017)
https://www.benoithamon2017.fr/wp-content/uploads/2017/04/hamon2017_enseignement.pdf
Projet de Benoît Hamon (16 mars 2017)
https://www.benoithamon2017.fr/wp-content/uploads/2017/03/projet-web1.pdf
Réponses à la CPU:
http://www.cpu.fr/wp-content/uploads/2017/04/Questionnaire-CPU.pdf
Réponses au questionnaire "Science et technologie" de 100 universitaires:
http://science-et-technologie.ens.fr/-IV-Enseignement-superieur-et-Education-scientifique-#iv1
2 Conseillers
M. Hamon est officiellement conseillé par Mme Doucet, députée, auteure avec M. Apparu d’un rapport parlementaire reprenant les poncifs des gestionnaires de l’Université et chantant les louanges de la politique de regroupement mise en place par la loi Fioraso [3], sans jamais s’approcher des problèmes de l’Université réelle. M. Peillon est également conseillé par Mme Brun et Mme Filippetti. Ancien membre de l’UNEF-ID, M. Hamon est naturellement entouré d’anciens cadres de ce syndicat étudiant. Son conseiller personnel est M. Prévost, ancien président de l’UNEF et membre des cabinets de Mme Fioraso et de Mme Vallaud-Belkacem. Son programme reprend des éléments du programme de M. Peillon mais il reprend aussi des propositions du groupe Marc Bloch des mesures en continuité avec le train de réformes néolibérales de la décennie, ce qui tranche avec l’image qu’il s’est construite.
2 Le passé
M. Hamon a été ministre de l'Éducation Nationale, de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche d’avril à août 2014. Il est resté sourd aux demandes venues de la communauté universitaire – en particulier la tribune du 4 avril appuyée par 12 000 signatures – exigeant que les promesses d’un changement de cap dans la politique universitaire soient tenues [4]. Malgré les demandes venues de son propre courant du parti socialiste, il protégea la mainmise du Groupe Marc Bloch sur les leviers du supérieur, avec les conséquences que l’on sait.
3 Le programme
M. Hamon a tardivement fait paraître son programme pour l’Université et la recherche. M. Hamon a une attention louable pour l’aide sociale étudiante, en particulier au travers d’un programme de construction de logements et du revenu de 600 € garanti dès 2017 pour tous les jeunes de 18 à 25 ans. Il souhaite aussi que le salaire d’entrée de carrière des enseignants-chercheurs soit rétabli à deux Smic — c’était le montant au début des années 1980. Il souhaite créer une section au Conseil National des Université (CNU) pour les économistes hétérodoxes. M. Hamon consent à un effort significatif sur les moyens. Il propose de consacrer un milliard d’euros de plus à l'enseignement supérieur et à la recherche (ESR), en récupérant une partie des 10 milliards consacrés à l’innovation. Cela financerait “le recrutement de 1 000 enseignants supplémentaires par an, professeurs agrégés (PRAG), en grande partie, et enseignants-chercheurs (EC), l’ouverture de 500 postes par an dans les Établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST), la revalorisation des carrières, la résorption de la précarité, la compensation du Glissement Vieillesse Technicité (GVT). Il souhaite augmenter le nombre de CRCT de 4 000 et tripler le nombre de postes à l'Institut Universitaire de France (IUF). Il souhaite créer 3 000 contrats doctoraux supplémentaires. Il souhaite geler le budget de l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) et augmenter les financements récurrents des laboratoires. Notre propre chiffrage de ces mesures est supérieur à celui du candidat. M. Hamon ne souhaite pas réformer les Écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE) mais assurer la formation continue des enseignants (3, 5 ou 10 jours de formation par an selon l'ancienneté et les besoins). Enfin, M. Hamon souhaite que le Commissariat Général à l'Investissement (CGI) et le programme des Initiatives d’Excellence (Idex) soient placés sous la (co)tutelle d’un ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche de plein exercice.
La partie progressiste du programme a donc été significativement étoffée après la primaire. Pour le reste, M. Hamon se prononce pour une “évaluation de l’impact du Crédit d’Impôt Recherche”, alors même que ce travail a été fait en 2014 par une commission d’enquête sénatoriale, travail qui a d’ailleurs été censuré [5]. Le rapport, factuel, se contentait pourtant de questionner l’éligibilité des dépenses, la faiblesse des contrôles et la rémunération des cabinets de conseil en défiscalisation. M. Hamon croit beaucoup à “la nécessité de poursuivre dans le sens des Comue qui ont permis de construire des synergies” [sic]. Il semble être le dernier à ignorer l’échec de ces nouvelles couches ruineuses, bureaucratiques et antidémocratiques, conçues délibérément au plus loin des besoins de la recherche et de l’enseignement. Ces machines de guerre ont été conçues par le groupe Marc Bloch [6] (M. Merindol en assure la paternité [7]) comme des structures instables destinées à pomper le meilleur des établissements fédérés pour créer un établissement “de recherche visible internationalement” entouré d’une gangue de collèges universitaires paupérisés. M. Hamon ignore manifestement leurs dysfonctionnements chroniques [8] et le fait qu’elles n’ont jamais été pensées que comme des structures transitoires destinées à imposer des réformes structurelles impopulaires.
M. Hamon a, pour sa part, longuement salué l’action de Mme Fioraso (qui, elle, soutient activement M. Macron), action qu’il souhaite prolonger en “aménageant le territoire en matière d’universités de proximité”. On reconnaît là un premier motif du programme néolibéral au long cours. M. Hamon souhaite poursuivre le programme d’”autonomie” en accordant la dévolution du patrimoine immobilier aux universités. Concernant la licence, M. Hamon attribue l’échec aux enseignants et à leurs méthodes pédagogiques. Il souhaite du reste investir dans “l’ingénierie pédagogique”, en particulier au travers de nouvelles offres de formations “tout au long de la vie” et d’un appel d’offre sur l’engagement de l’Université dans la “transition numérique”, dans le cadre du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA). Il plaide également pour “un grand plan de formation continue des enseignants” consacré “à la personnalisation des apprentissages, à la différenciation pédagogique, et à l’usage pédagogique du numérique”. M. Hamon prône une réforme de secondarisation de la Licence, par un recrutement massif de PRAG et en mettant en avant un autre motif néolibéral récurrent : la “synergie entre lycée et filières post-bac”, baptisée -3/+3, ce qui se traduit dans le programme de M. Hamon par une réforme de la Licence vers un tronc commun multidisciplinaire. Il souhaite associer dans un service commun les formations secondaires et le premier cycle de l'enseignement supérieur, en associant DGESCO et DGESIP. Il souhaite par ailleurs supprimer les cours en amphithéâtre en première année. Pour achever le programme, M. Hamon souhaite que le bénévolat et le service civique permettent de valider le premier semestre de Licence.
4 En résumé
Le programme de M. Hamon a beaucoup progressé après la primaire socialiste. Il émet en particulier des propositions louables sur les moyens et sur l’emploi scientifique. Ses propositions sont très semblables à celles faites par M. Hollande en 2012, promesses qui n’ont pas été tenues. On note la disparition regrettable des mesures de retour à la démocratie universitaire et aux libertés académiques. Sa proposition de mise sous tutelle du Commissariat Général à l'Investissement (CGI) et du programme des Initiatives d’Excellence (Idex) est positive, mais sans commune mesure avec le changement de cap qu’attend la communauté universitaire. La critique est feutrée et la proposition en demi-teinte. Le programme de M. Hamon pour l’Université et la recherche tranche avec l’image qu’il a construite pendant la campagne des primaires à partir de quelques propositions très discutées comme le revenu universel d’existence ou le monopole d’Etat sur la commercialisation du cannabis. La secondarisation de la licence, le remplacement des enseignants-chercheurs par des PRAG, la poursuite de la baisse des exigences, l’invocation de gadgets pédagogiques, tous ces lieux communs du moment concourent à une accélération de la dégradation de l’Université. La poursuite de la politique de regroupements à marche forcée achève de rendre ce programme décevant, malgré l’effort budgétaire significatif consenti.
M.Fillon
1 Sources
Programme ESR de François Fillon pour la primaire de la droite
http://groupejeanpierrevernant.info/ProjetFillon1.pdf
Programme ESR final de François Fillon
http://groupejeanpierrevernant.info/ProjetFillon2.pdf
Projet pour la France (13 mars 2017)
http://groupejeanpierrevernant.info/ProjetFillon3.pdf
Réponses à la CPU:
http://www.cpu.fr/wp-content/uploads/2017/03/Questionnaire-CPU-Reeponse-de-F-FILLON.pdf
Réponses au questionnaire "Science et technologie" de 100 universitaires:
http://science-et-technologie.ens.fr/-IV-Enseignement-superieur-et-Education-scientifique-#iv1
2 Conseillers
M. Fillon est secondé par M. Hetzel, qui fut conseiller Éducation de M. Fillon, puis directeur général de la DGESIP (Direction Générale de l'Enseignement Supérieur et de l'Insertion Professionnelle) de Mme Pécresse, d'août 2008 à mars 2012 [9]. Le programme reprend des idées et des éléments de langage de M. Blanquer, proche de M. Juppé, qui fut directeur de la Direction Générale de l’Enseignement Scolaire (DGESCO) de décembre 2009 à novembre 2012, et qui est actuellement directeur général du groupe Essec. C’est d’ailleurs le dirigeant de grande école le mieux payé de France et de Navarre (250 k€ annuels). Plus généralement, si l’entourage de M. Macron comporte des hauts fonctionnaires, ce sont plutôt des dirigeants de Grandes Écoles qui font du lobbying auprès de M. Fillon. Le pôle ESR comprend en outre M. Goulard, qui fut ministre de l’ESR de 2005 à 2007, et M. Grosperrin, sénateur auteur d’un rapport éponyme dont l’indigence et l’autoritarisme cocardier restent dans toutes les mémoires. M. Belloc est sans fonction officielle dans l’organigramme de campagne de M.Fillon. Ardent défenseur de la doctrine de l’”autonomie”, il demeure une figure incontournable de la droite conservatrice [10].
2 Le passé
La loi LRU, dite “loi Pécresse”, préparée par le rapport Aghion-Cohen, a été votée sous le gouvernement Fillon 2. Elle a installé les premiers volets de l’”autonomie”, transférant aux universités des dépenses non compensées budgétairement, créant une inflation de la technostructure bureaucratique sans précédent, et accordant des pouvoirs démesurés aux présidents d’universités. Le projet de décret sur le statut des enseignants-chercheurs instaurant la modulation de service a provoqué en 2009 le plus grand mouvement de grève universitaire de l’après 68. On doit également à M. Fillon la mise en concurrence des universités pour les Idex (les mal nommées “initiatives d’excellence”). L’ensemble de la période a été marquée par des régressions majeures des libertés académiques. C’est également sous le gouvernement Fillon 2 que le rapport Attali-Macron fut remis à M. Sarkozy [11].
3 Le programme
Le programme de M. Fillon pour l’enseignement supérieur et la recherche est très clair et très détaillé dans son objectif comme dans ses moyens. Il s’agit de parachever l’autonomie. Le programme propose d’instaurer la sélection à l’entrée de l’Université et au sein des différentes filières, et de désengager l’Etat en remplaçant les financements publics par l’augmentation des frais d’inscription, par des financements privés et par la formation continue. Il souhaite cependant renforcer le budget des Investissements d’Avenir. Il entend moduler les financements des établissements sur la base d’évaluations de leurs résultats en matière d’insertion professionnelle, de recherche et de management. L’Université serait concernée par la suppression proposée de 500 000 emplois publics. M. Fillon souhaite supprimer le statut national des enseignant-chercheurs en laissant les universités (leurs équipes présidentielles) décider des recrutements et des statuts offerts aux enseignants (contractuels ou fonctionnaires). Il conserverait cependant le Conseil national des universités (CNU) et interdirait, sauf dérogation, le localisme dans le recrutement des professeurs — il souhaite interdire la promotion des maîtres de conférences comme professeurs dans leur université. Il propose de confier l’enseignement professionnel aux régions et d’adapter l’université à l’insertion professionnelle des étudiants. Enfin, il souhaite faire cesser les oukazes et les circulaires émanant du ministère et transférer les hauts fonctionnaires et les cadres du ministère dans les établissements. Le programme prévoit un contrôle budgétaire et une évaluation accrue des établissements. Un apport de campagne de M. Blanquer consiste à promouvoir l’idée que le succès des étudiants est affaire exclusive de pédagogie, de talent des enseignants, et pas de moyens. On note l’usage récurrent des “pédagogies innovantes” comme cheval de Troie pour promouvoir l’enseignement supérieur privé, le désengagement de l'État de l’enseignement supérieur public et la mise en concurrence des enseignants et des établissements. M. Fillon souhaite favoriser la création de "collèges universitaires" rassemblant licences générales et classes préparatoires et confier, comme M. Hamon, la continuité Lycée-Licence aux professeurs agrégés (PRAG). M. Fillon entend poursuivre la montée en charge du Crédit d’Impôt Recherche (CIR). Pour achever la politique de regroupements, M. Fillon souhaite étendre les statuts dérogatoires par une nouvelle loi ou par un traitement au cas par cas. Il propose d’augmenter la fraction de représentants des milieux économiques dans les conseils d’administration et d’encourager le recrutement de présidents d’université qui ne soient pas universitaires.
4 En résumé
Le projet néolibéral de M. Fillon est pratiquement identique à celui de M. Macron, mais il est significativement plus honnête puisqu’il n’avance pas masqué par une euphémisation permanente et par la production d’énoncés contradictoires. Sa grande qualité est la clarté et la cohérence : achever l’“autonomie” restée au milieu du gué malgré la décennie de réformes successives. Si la sélection, l’augmentation des frais d’inscription et la mise en concurrence des universités s’en prennent frontalement aux étudiants, la liquidation simultanée des libertés académiques et des statuts s’en prend aux universitaires.
Nous n’avons pas souhaité détailler ici le programme pour l’enseignement supérieur et la recherche de M. Dupont-Aignan, qui constitue une alternative, à droite, à M.Fillon. M. Dupont-Aignan est conseillé par M. Anceau. Le programme reprend les termes du débat entre “républicains” et “pédagogues”, ligne de démarcation que nous appelons pour notre part à dépasser pour réconcilier exigence et émancipation. Ce programme est nettement démarqué de celui de M.Fillon du point de vue des mesures comme des moyens (augmentation du budget de 1,08% de PIB à 1,30%). Nous renvoyons le lectorat intéressé au programme lui-même:
http://www.nda-2017.fr/theme/education-enseignement-superieur
M.Macron
1 Les sources
Programme:
https://en-marche.fr/emmanuel-macron/le-programme/enseignement-superieur-recherche
Réponses à la CPU:
http://www.cpu.fr/wp-content/uploads/2017/03/CPUreponseEM.pdf
Réponses au questionnaire "Science et technologie" de 100 universitaires:
http://science-et-technologie.ens.fr/-IV-Enseignement-superieur-et-Education-scientifique-#iv1
Discours devant la CPU, discours à l’INRIA de Grenoble et Table ronde RUE 2017
2 Conseillers
Quatre membres de l’équipe de campagne de M. Macron se sont exprimés pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche: M. de Rugy [12] est pressenti comme Ministre de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche; M. Berger [13] et M. Coulhon [14], tous deux conseillers de M. Macron, sont en compétition pour devenir Secrétaire d'État chargé de l'Enseignement supérieur et de la Recherche en cas de victoire de celui-là ; M. Aghion travaille au programme économique mais contribue également au programme pour l’Université en temps que théoricien de l’”autonomie”. Mme Fioraso a organisé la présentation publique du programme pour l’enseignement supérieur et la recherche, présentation pendant laquelle il a semblé le découvrir lui-même [15]. Les membres répertoriés du groupe Marc Bloch – recteurs, hauts fonctionnaires (énarques, X-mines, X-ponts), présidents d’universités – se sont ralliés à sa candidature. La Conférence des Présidents d’Université (CPU) utilise ses outils de communication pour promouvoir sa candidature. M. Macron est également conseillé par M. Cohen, co-auteur avec M. Aghion du rapport qui constitue l’armature idéologique de la doctrine de l’”autonomie” [16].
3 Le passé
M. Macron a été la plume du rapport Attali-Macron commandé par M. Sarkozy, rapport néolibéral qui articule “autonomie” et politique de regroupement [11]. M. Macron a été secrétaire général adjoint de l'Elysée, principal conseiller économique de François Hollande, puis ministre de l'Économie, de l'Industrie et du Numérique de 2014 à 2016. Alors que la France retombait en récession en 2012-2013 avec l'ensemble de la zone euro, M. Macron a conduit une politique contre-productive de réduction (trop rapide) des déficits. Il a promu des niches fiscales (20 Milliards € de Crédit Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi, CICE, et 5 Milliards € de Crédit Impôt Recherche, CIR, par an, soit 1,2% du PIB) qui ont plus profité aux dividendes qu’à l’emploi et à l’innovation. Il a torpillé le projet de loi de séparation des activités bancaires entre banques de dépôts et banques d'investissement. Il a concentré son action sur les problèmes d'horaires d'ouverture de magasins et de lignes de bus. On lui doit les annulations de crédits de fin d’exercice, crédits dûment votés par la représentation nationale.
4 L’idéologie
Le populisme de M. Macron reposant sur le récit (storytelling) d’une pacification de la société par l’indifférenciation politique, son discours et son programme se composent le plus souvent d’énoncés ouverts, euphémisés, cotonneux, à la logique évanescente [17] destinés avant tout à nier tout antagonisme économique et social. Nous considérons ici que le programme de M. Macron est cohérent et repose sur les doctrines de l’”autonomie” et de l’”excellence” théorisée par ses conseillers, M. Aghion et M. Cohen, et dans un certain nombre d’autres textes produits par les gestionnaires qui l’entourent. Cette doctrine repose sur des croyances martelées sans cesse et qui ne reposent sur aucune analyse scientifiquement fondée. La doctrine de l”excellence” postule que la production de richesse d’une société (seule finalité envisagée de l’enseignement supérieur et de la recherche) repose sur la concentration des moyens dans un petit nombre d’établissements pluridisciplinaires. Cela suppose donc de tout mettre en œuvre pour différencier les établissements, de sorte à favoriser inégalités et hiérarchisation. Il s’agit en effet de déclasser les établissements hors des métropoles (banlieue et villes moyennes) en les transformant en établissements “de proximité” paupérisés, spécialisés dans l’enseignement professionnel et largement privatisés [18].
Alors que les données montrent que la production scientifique est avant tout déterminée par les moyens (la part du produit intérieur brut) investis dans l’éducation et la recherche, l’idéologie de l’”autonomie” postule qu’il s’agit avant tout d’une question structurelle : il s’agirait d’implanter en France le “modèle international”, modèle qui s’avère être en réalité celui des universités privées américaines de la “Ivy League”. L’”autonomie” repose sur quatre volets :
- l’« autonomie » administrative : il s’agit de remettre les décisions à des conseils d’administration mis hors de portée des universitaires, dirigés par des présidents managers tout puissants, non-universitaires, et tenus par un pilotage incitatif ;
- l’« autonomie » de gestion des ressources humaines : il s’agit de mettre fin aux libertés académiques qui fondent l’université en mettant fin à la collégialité et au recrutement par les pairs ; il s’agit aussi de mettre fin au statut de fonctionnaire pour créer un marché dérégulé des universitaires et des chercheurs.
- l’« autonomie » pédagogique : il s’agit encore une fois de mettre fin aux libertés académiques qui fondent l’université en pilotant l’enseignement au niveau des savoirs comme des méthodes ; il s’agit aussi d’introduire la sélection des étudiants de sorte à mettre en concurrence les établissements ;
- l’« autonomie » financière : il s’agit de transférer la charge financière du supérieur de l’Etat aux « clients », et pour ce faire, il est nécessaire d’augmenter les frais d’inscription et de les moduler pour mettre en concurrence les formations.
Le bras armé des doctrines de l’”autonomie” et de l’”excellence” est le néomanagement, qui repose sur trois principes:
- faire coproduire les réformes de dépossession par ceux-là même qui en sont les victimes ; le processus de contrôle est désigné par antiphrase d’« incitation » et de « bottom-up ».
- systématiser l’évaluation comme instrument de contrôle, de sorte que chacun soit sans arrêt placé en situation d’occuper la position d’évaluateur et d’évalué.
- systématiser l’usage du “ranking” de sorte à faire apparaître artificiellement un marché qui n’a pas la moindre réalité tangible, jusqu’à le faire exister dans l’imaginaire collectif.
5 Le programme
M. Macron se propose de poursuivre ce programme cohérent entamé pendant les deux derniers quinquennats. Concernant l’”autonomie” administrative, il propose de déréguler les statuts des universités pour accélérer le processus de différenciation. Il s’agit en particulier de déréguler la composition des instances dirigeantes et l’organisation interne, pour achever la dépossession des universitaires sur leur métier. Il propose de faire recruter les présidents d’université par des jurys internationaux (fiction d’une “norme internationale”), hors de toute élection par la communauté universitaire. Concernant l’« autonomie » de gestion des ressources humaines, M. Macron propose la suppression du Conseil National des Universités et souhaite confier aux présidences le soin du recrutement et de la négociation salariale. Il envisage de ne plus recourir au statut de fonctionnaire, et de réformer plus généralement toute la fonction publique. La suppression d’un recrutement par une instance scientifique, élue par les pairs, constitue une attaque obscurantiste majeure contre les libertés académiques. Concernant l’« autonomie » pédagogique, M. Macron, comme M. Fillon, souhaite introduire la sélection et déréguler l’offre d’enseignement, en maintenant un pilotage incitatif fort. Concernant l’”autonomie” financière, M. Macron se prononce contre l’augmentation des frais d’inscription, hormis pour les étudiants étrangers, mais prévoit cependant de créer les conditions de dérégulation permettant aux universités de procéder à ces augmentations. M. Macron souhaite en finir avec la répartition des moyens sur la base d’un algorithme aveugle. Comme M. Fillon, il prône l’allocation de moyens par le ministère sur une base contractuelle, en fonction de résultats obtenus en matière d’insertion professionnelle, de recherche et de management. M. Macron souhaite supprimer 120 000 emplois publics. Il n’envisage pas d’augmenter le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche (ce qu’il qualifie par antiphrase de “sanctuarisation”), alors même que les effectifs étudiants vont progresser de 3 % par an et le glissement vieillesse technicité de 1% par an, et qu’il prévoit l’augmentation des lignes budgétaires destinées au financement ou à la défiscalisation d’entreprises privées — par exemple, en constituant un fond de 10 milliards d’euros pour l’industrie du futur. M. Macron prévoit donc, pour compenser les baisses budgétaires pour l’université et la recherche universitaire, d’élargir l’accès aux ressources propres (créations de filiales, accroissement des capacités d’emprunt, partenariats public-privé, élargissement du nombre de formations éligibles au titre de la formation professionnelle…)
Concernant la politique d’”excellence”, M. Macron souhaite poursuivre la politique de regroupement et “assumer une différenciation plus forte des établissements, avec des universités "d'excellence en tous points, qui devront briller à l’échelle internationale et des universités de proximité, dépositaires de la confiance des familles et des entreprises". Dans ce contexte, il entend créer 80 000 places supplémentaires dans de nouvelles filières courtes professionnalisantes proposées, en lien avec les branches professionnelles, dans ces collèges universitaires de proximité.
Concernant le néomanagement, M. Macron souhaite imposer de nouvelles évaluations aux individus (évaluation des universitaires par les étudiants, les familles et les managers) et aux structures (évaluations sur la base des taux de réussite et des taux d’intégration professionnelle; évaluation de la qualité des recrutements). Il entend conserver le pilotage centralisé de la transformation structurelle au moyens des mécanismes incitatifs : investissements d’avenir et dialogue contractuel sur les moyens.
6 En résumé
Le programme de M. Macron pousse la logique néolibérale un cran plus loin encore que M. Fillon, avec la suppression du Conseil National des Universités et la destruction méthodique de pans entiers des libertés académiques. S’ajoute à ce programme destructif, qui prolonge celui poursuivi depuis dix ans, la perspective de subir, bien plus encore que par le passé, les pratiques clientélistes des lobbies gestionnaires et la mainmise du groupe Marc Bloch sur le supérieur. L’usage permanent d’une novlangue managériale et la confusion permanente entre science et technique achèvent de rendre désagréable le programme destructeur de M. Macron.
[1] M. Macron entend par exemple imposer la réforme du droit du travail par ordonnances.
https://www.mediapart.fr/journal/france/100417/croquis-macron-dans-sa-derniere-ligne-droite
Il entend créer un nouveau “conseil stratégique de la recherche et de l’innovation, rattaché au président” pour piloter la recherche depuis l’Elysée, par dessus le serétariat d’Etat.
[2] Nous renvoyons à notre billet consacré à la question du Front National:
./#FrontNational
Le programme de Mme Le Pen est indigent. Les rares éléments précis (sélection à l’entrée de l’Université, augmentation des frais d’inscription pour les étrangers, recentrage du baccalauréat sur quatre matières,…) figurent également dans les programmes de M. Fillon et de M. Macron:
http://www.letudiant.fr/educpros/entretiens/marine-le-pen-seul-le-merite-scolaire-doit-etre-un-critere-de-selection.html
Il faut s'inquiéter de la diffusion des lieux communs d'extrême-droite associant les problèmes de l'école à l'immigration jusque, dans les milieux universitaires:
http://uneheuredepeine.blogspot.fr/2017/03/lorigine-des-inegalites-dorigine.html
[3] Pour construire leur rapport, Mme Doucet et M. Apparu ont auditionné presque exclusivement la composante gestionnaire de l’Université :
http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i4062.asp
[4] La tribune est reproduite ici :
https://groupedu4avril.wordpress.com/la-tribune/
La pétition est maintenant fermée à la signature :
https://www.change.org/p/tribune-le-changement-%C3%A0-l-universit%C3%A9-et-dans-la-recherche-c-est-maintenant
[5] Le site http://marcbloch2012.fr a été fermé en prévision de l’élection présidentielle 2017. La dépêche AEF reste disponible encache.
[6] ./RapportMerindol.pdf
[7] Enquête sénatoriale sur le Crédit Impôt Recherche (CIR) :
https://www.senat.fr/commission/enquete/detournement_du_credit_dimpot_recherche.html
Voir aussi la synthèse sur le CIR qui en précise le montant :
http://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/Rapports/85/7/1._Synthese_CIR_Publication_334857.pdf
Voir enfin le rapport de Sciences en Marche sur le dispositif :
http://sciencesenmarche.org/fr/wp-content/uploads/2015/04/RapportSenat_SeM.pdf
[8] Même Mme Musselin, en général louangeuse des réformes néolibérales en cours depuis 10 ans, se range à l’évidence et reprend maintenant les arguments que nous développons depuis 2012 :
Christine Musselin, La Grande Course des universités, Presses de Science Po.
http://www.pressesdesciencespo.fr/fr/livre/?GCOI=27246100383210
[9] M. Hetzel est gestionnaire de formation (sa thèse portait sur "design management et constitution de l'offre"). Il a cessé après cinq ans de carrière l’enseignement et la recherche pour devenir manager à temps plein, puis politicien (directeur de laboratoire, recteur, conseiller, directeur de la DGESIP, député du Bas-Rhin) mais demeure fin connaisseur de la partie institutionnelle du supérieur. M. Hetzel fut l’auteur d’un rapport en 2006 :
http://groupejeanpierrevernant.info/RapportHetzel.pdf
[10] M. Belloc est conseiller stratégique de la direction générale de SKEMA Business School, après avoir été conseiller au cabinet de M. Sarkozy. Il a été à l’origine du rapport commandé à M. Aghion et M. Cohen, rapport qui théorise l’”autonomie”. Il a lui même écrit un rapport sur le statut des enseignant-chercheurs :
http://groupejeanpierrevernant.info/RapportBelloc.pdf
M. Belloc s’exprime de manière répétitive dans Les Echos :
https://www.lesechos.fr/journalistes/index.php?ihttp://groupejeanpierrevernant.info/RapportHetzel.pdfd=73359
[11] ./RapportAttali.pdf
[12] M. Rugy est ce qu’il est convenu d’appeler un maroquiniste. Il n’a pas le moindre lien — pas même un rapport parlementaire — avec l’éducation.
[13] Ancien président de l’université Paris 7, alors proche de l’UMP et de M. Descoings, M. Berger est connu pour un désastreux Partenariat Public Privé (PPP) souscrit pour son université, et destiné à lui attirer les bonnes grâces de Mme Pécresse. Devenu strauss-khanien en 2009, il intègre le Groupe Marc Bloch, puis devient aubryste à la chute de M. Strauss-Khan avant de devenir conseiller élyséen pour l’éducation de M. Hollande. Depuis l’Elysée, il fait créer un poste de direction au CEA à son intention, poste qu’il occupe aujourd’hui.
[14] M. Coulhon a été vice-président de la Conférence des présidents d’université (CPU), conseiller spécial puis directeur adjoint du cabinet de Valérie Pécresse. Il a supervisé en 2008 l’application de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (loi LRU). Toujours sous le gouvernement Fillon 2, il a ensuite été en charge du programme “campus d'excellence” au Commissariat général à l'investissement (CGI). Il est devenu président de la ComUE “Paris Sciences et Lettres“ suite à un coup de force du président du CNRS, M. Fuchs, et du directeur de l’ENS, M. Mézard, contre Mme Canto-Sperber. Sa mandature a été marquée par le salaire de 180 000 € qu’il s’est fait voter par boucle mail en novembre 2015 :
http://www.letudiant.fr/educpros/actualite/l-elitisme-de-paris-sciences-et-lettres-chahute-en-cneser.html
Dans la période récente, son obsession a été le classement de Shangaï :
http://www.letudiant.fr/educpros/entretiens/coulhon.html
en poussant l’absurdité jusqu’à monter une cellule chargée de calculer le classement virtuel de PSL dans Shangaï (ce classement qui ne reconnaît que les universités, de sorte qu’aucune ComUE n’y est classée, et en particulier PSL, qui ne comprend aucune université) :
http://www.lemonde.fr/campus/article/2016/10/05/si-les-universites-francaises-fusionnaient-a-quoi-ressemblerait-le-classement-de-shanghai_5008838_4401467.html
[15] La présentation a eu lieu dans un établissement public (INRIA Grenoble), dix jours avant le premier tour :
http://www.lalibre.be/actu/france/quand-macron-decouvre-son-programme-pour-l-enseignement-et-avoue-ne-pas-le-comprendre-video-58f25bddcd70812a657483d8
Seul moment marquant du discours, et aveu: «Mon équipe m'a préparé un texte dont la subtilité mériterait que je le lise comme un entomologiste pour ne froisser personne. Comme je n'arrive pas à être convaincant en ânonnant des textes lus, je suis obligé d'être sincère et de vous dire ce que je pense et donc ce que je vais faire si je suis élu. Je suis tout à fait favorable à ce qu'on construise de nouveaux modèles de gouvernance. (...) Ces nouveaux modèles pourront être mis en place à l'initiative des acteurs eux-mêmes et assureront une plus grande souplesse (blanc). Je vous lis ce qu'on a m'a mis… (blanc) dans la composition des instances dirigeantes et dans les modalités d'organisation interne (blanc). Initialement je n'ai pas compris cette phrase. Moi, la relation que je veux instaurer avec vous, c'est plutôt une relation de clarté pour qu'on puisse agir efficacement.”
[16] Il est impératif pour comprendre les doctrines de l’”autonomie” et de l’”excellence” de lire le rapport :
./RapportAttali.pdfwww.groupejeanpierrevernant.edu.eu.org/RapportCohenAghion.pdf
et de prendre connaissance de la présentation Powerpoint faite à Mme Pécresse :
www.groupejeanpierrevernant.edu.eu.org/SlidesAghion.pdf
[17] Tout ou presque est euphémisé, la suppression de 120 000 postes de fonctionnaires comme la suppression de l’impôt sur les patrimoines financiers (ISF). Seuls les lecteurs du journal Les Echos ont droit à la franchise :
https://patrimoine.lesechos.fr/impots/impots-revenu/0211917826329-fiscalite-de-l-epargne-le-programme-demmanuel-macron-2075385.php La question de la régulation financière est soigneusement évitée :
http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/emmanuel-macron-et-la-finance-plus-qu-un-probleme-personnel-652325.html
alors même que M.Macron a torpillé le projet de loi de séparation des activités bancaires entre banques de dépôts et banques d'investissement :
http://www.latribune.fr/opinions/20140131trib000813011/separation-bancaire-la-defaite-de-la-democratie.html
La question du report de l’âge de la retraite est contournée :
http://www.arretsurimages.net/breves/2017-03-02/Pisani-Ferry-chef-d-orchestre-hesitant-du-programme-de-Macron-id20477
Le cadrage macro-économique, enfin, reste totalement flou. M. Macron propose 60 milliards € d’économie sur la dépense publique tout en faisant un plan d’investissement public de 50 milliards €, ce qui implique des coupes dans les prestations sociales et les dépenses de personnel. Rien n’est mentionné sur les moyens d’économiser 10 milliards € sur l’assurance chômage, 25 milliards € sur la sphère sociale et 15 milliards € sur l’assurance-maladie.
[18] On reconnaît là le motif du dogme central du néolibéralisme: la mise en concurrence des individus, des territoires et des structures comme principe d’optimisation. Le rapport Attali-Macron (voir note 11), paru un an après la crise de 2007 engendrée par la dérégulation bancaire, réussit ainsi l’exploit de prédire le retour au plein emploi en 2012. Le rapport Aghion-Pisany-Ferry-Cohen affirme, lui, que "La dérégulation financière ne semble pas avoir d’impact significatif sur le chômage." quand la crise de 2007-2008 a engendré en France une augmentation du chômage de 75%.